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Refuser l’héritage ou comment « hériter » de Mai 68 ?

Déc
04
2018
19h00
Conf

Conférence animée par Jean-Louis Violeau

Mardi 04 décembre, 19h00, Amphi Puget, ENSA•Marseille

Résumé de la présentation de ses travaux par M. Violeau :

Refuser l’héritage : le feu couve sous la cendre et l’avant-68 annonce une profonde rupture dans le corps des architectes. Quelques élèves, pas les plus médiocres et c’est bien le problème, commencent en effet à dénoncer une esthétique académique et un art scolastique où l’idée du beau se réduit à un système de modèles et la pratique à un système de règles.

Refuser l’héritage : dénonciation de l’esthétique du fini, du rendu, de la maîtrise technique et de la reproduction, mais aussi dénonciation des formes d’existence sociale de l’École des Beaux-Arts (folklore, solidarité virile, bizutage, auto-enseignement et rapport “nouvos”-anciens…) qui se prolongeaient hors les murs, au cœur de la profession, par toute une série de liens (des “repas du patron” et des anciens de l’Atelier à la généralisation de la “place”). Cette forme d’existence sociale se trouvera condensée, en Mai, dans les dénonciations du « nœud-pap », symbole d’une façon d’être et symbole de la vanité d’un architecte devenu notable.

Refuser l’héritage : aux Beaux-Arts, le climat de contestation de l’enseignement n’est donc pas apparu d’un bloc pas plus qu’il ne s’est envolé avec le printemps. S’il est vrai que Mai 68 se présente, dans de nombreux univers sociaux, comme une crise généralisée de la croyance, à l’École des Beaux-Arts, la déchirure du réseau de croyance commence bien avant Mai. Elle commence au moins avec l’arrivée de Candilis en 1964 et elle se confirme définitivement au Grand Palais à la fin de l’année suivante. De 1964 à 1967, ces années-là resteront à jamais moins célèbres que celle qui leur succédera, 68 « l’année » en majesté. Ces années-là furent pourtant cruciales.

Refuser l’héritage : la question de l’époque n’est pas « quelle architecture va-t-on faire ? », mais plutôt « comment et avec qui va-t-on la faire ? ». A la manière du dimanche de Bouvines de Georges Duby, Mai 68 est le nuage que soulèvent les vrais événements survenus avant lui, c’est-à-dire les mutations profondes.

Refuser l’héritage : problème, personne ne s’est mis d’accord depuis sur le mode d’emploi de cet héritage des années 68, né lui-même d’abord d’un refus. A chacun d’entre nous de s’en saisir. En 68, TOUT était politique ! Et aujourd’hui, tout serait positivement fluide ou désespérément liquide ?

M. Violeau est sociologue et professeur à l’ENSA-Nantes

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Conférence associée au séminaire doctoral #2